Les poissons dans le bassin versant du fleuve Saint-Jean

Grâce à la compilation des informations existantes et une enquête réalisée auprès d’experts et spécialistes des populations de poissons locaux, il nous a été possible de réaliser une carte de distribution pour 13 espèces de poissons à l’échelle du bassin versant du fleuve Saint-jean. La réalisation de ces cartes a mis en évidence la progression de certaines espèces exotiques au niveau de certains plans d’eau où elles étaient inconnues. Elle a également contribué à identifier des zones refuges potentielles, dans lesquelles certaines espèces indigènes sont encore à l’abri grâce, notamment, à des obstacles naturels et artificiels que des espèces envahissantes comme l’achigan à petite bouche et le maskinongé ne peuvent franchir.

Les poissons indigènes

 distribution des poissons indigènes au bassin versant du fleuve St-Jeandistribution du touladi dans le bassin versant du fleuve St-JeanDistribution de l'omble de fontaine dans le bassin versant du fleuve St-JeanDistribution de la lotte dans le bassin versant du fleuve St-JeanDistribution du Grand Corégone dans le bassin versant du fleuve St-JeanDistribution de la barbotte brune dans le bassin versant du fleuve St-JeanDistribution du chabot visqueux dans le bassin versant du fleuve St-Jean

De nombreuses recherches ont prouvé que certaines espèces exotiques de poissons, le maskinongé et l’achigan à petite bouche, par exemple, soumettent le touladi à une compétition interspécifique si forte au point de compromettre sa survie dans son habitat naturel, et de menacer ainsi l’intégrité faunique de certains plans d’eau. Par ailleurs, la disparition ou simplement la diminution des populations de certaines espèces, qui constituent un soutien important à l’industrie de la pêche sportive, pourrait nuire à ce secteur socio-économique[1]. Aussi, certaines espèces indigènes sont chargées de valeurs culturelles auprès des populations autochtones pour lesquelles, elles représentent une part symbolique de patrimoine.


[1] ‘’2 milliards $ en retombées directes, 7 milliards $ en retombées indirectes, que cela génère bon nombre d’emplois, souvent en région, il serait dommage de prendre des décisions non fondées scientifiquement’’.
(https://www.lesoleil.com/actualite/science/louis-bernatchez-la-passion-des-poissons-et-de-leur-adn-bf48f0fc9b2ec2fc9ed2074aefbf0264

Les poissons exotiques

Distribution des poissons exotiques dans le bassin versant du fleuve St-JeanDistribution de la ouananiche dans le bassin versant du fleuve St-JeanDistribution du maskinongédans le bassin versant du fleuve St-JeanDistribution du Grand Brochet et du Carassin dans le bassin versant du fleuve St-JeanDistribution de l'éperlan arc-en-ciel dans le bassin versant du fleuve St-JeanDistribution de l'achigan à petite bouche dans le fleuve St-Jean

ADN environnemental

Tout organisme vivant laisse des traces d’ADN dans son environnement. La méthode de l’ADNe consiste donc à déterminer si une espèce est présente ou non dans un milieu en regardant si elle y a laissé une quantité d’ADN significative. Dans notre cas, il s’agissait de prélever des échantillons d’eau et de regarder si l’ADN des espèces de poissons recherché y été présent.

La progression des espèces exotiques au sein du bassin versant du fleuve St-Jean soulève l’inquiétude concernant l’état de bouleversement qu’elles peuvent avoir sur la diversité des communautés de poissons indigènes. Menée dans le cadre d’une collaboration avec le laboratoire de Dr Louis Bernatchez, de la Chaire de recherche du Canada en génomique et conservation des ressources aquatiques de l’université de Laval, l’étude de l’ADN environnemental (ADNe) a permis de fournir un portrait de la situation des salmonidés indigènes en passe d’être remplacés par des espèces exotiques, dont la ouananiche, l’éperlan arc-en-ciel, l’achigan à petite bouche et le maskinongé. Pour des raisons de faisabilité, cette étude s’est concentrée, dans un premier temps, dans le sous bassin versant de la rivière St-François (lacs St-François, Beau, Glazier et rivières St-François et Bleue).

Stations echantillonnage ADNe bassin rivière St-François

 

Résultats

  • Le maskinongé a été détecté dans deux des huit stations d’échantillonnage: Le lac Beau et le lac Glazier
  • L’achigan à petite bouche a été détecté dans 3 stations: Lac Beau, lac Glazier et rivière Bleue
  • L’éperlan arc-en-ciel est présent dans tous les sites sauf le lac St-François et la rivière St-François, ce qui laisse penser qu’il n’a pas encore envahi cette partie du bassin versant.
  • L’omble de fontaine a été détecté dans tous les plans d’eau échantillonnés, ce qui suggère qu’il est présent partout dans le bassin versant.
  • Le touladi a été détecté dans 2 plans d’eau: le lac Beau et le lac Pohénégamook
  • La ouananiche a été détectée dans le lac St-François, la lac Pohénégamook et les rivières Bleue et St-François

Il est important de noté que la méthode de l’ADNe a certaines limites. En effet, il est possible qu’une espèce ne soit pas détectée par la présente méthode si son abondance est très faible ou encore à une trop grande distance des sites d’échantillonnage. Le grand corégone a été détecté dans aucun des sites d’échantillonnage. Le laboratoire ADNe de l’Université Laval a émis l’hypothèse suivante afin d’expliquer l’absence complète de données du Grand Corégone dans les 8 stations d’échantillonnage. Nous savons que cette région a été colonisée par une lignée glaciaire de corégone (la lignée Acadienne) qui diffère de celle sur laquelle les amorces ont été développées (la lignée du Mississipi). A priori, les amorces devraient bien fonctionner pour différentes lignées au sein d’une même espèce, mais il n’est pas impossible qu’une mutation au sein de la lignée Acadienne rende les amorces non fonctionnelles pour les individus provenant de cette lignée. Il est également surprenant qu’il n’y ait aucune présence de maskinongé dans le lac Pohénégamook. Afin d’approfondir cette étude, il sera intéressant de la réaliser sur une échelle plus petite, soit de réaliser plusieurs stations sur une même étendue d’eau afin d’obtenir un portrait efficient.

Ce projet a pu être réalisé grâce au financement de Pêches et Océans Canada